Ville de Dinant
LE BULBE DE LA COLLEGIALE  

 

 

En 1565, la ville de Dinant charge un horloger malinois de fournir une horloge et de la placer sur la tour du pont de la ville. Mais pour suspendre cette nouvelle horloge, il faut ériger un nouveau comble à la tour (servant de maison communale). Le magistrat de la ville décide d’y placer également la cloche d’heures. Cependant, le poids de la structure devant composer ce nouveau comble risque de ne pas pouvoir être supporté par le vieux pont.

Pendant que le charpentier s’affaire avec ses compagnons à assembler la nouvelle charpente dans la halle toute proche, quelques bourgeois émettent l’idée d’ériger le comble sur la collégiale dont la flèche de la tour sud avait été détruite par les Français en 1554.

Le prince-évêque, Gérard de Groesbeeck mis au courant de l’affaire, marque son accord. En 1566, la flèche à l’allure si pittoresque s’élève enfin entre les deux tours mais la construction présente de nombreuses défectuosités réfectionnées non sans mal. En 1569-1570 a lieu l’installation de la nouvelle horloge. Equipée de trois cadrans, elle est reliée à un jeu de clochettes « appeaulx ».

Très inquiets du manque de stabilité de la construction, les édiles de la ville ordonnent, le 9 août 1591, la démolition du clocher mais le manque de ressources financières empêche l’exécution de cette décision. En 1791, le bulbe est touché par des tirs de canons lors d’échanges entre les troupes autrichiennes et les « Patriotes Belgiques ».

En 1831, la foudre tombe sur le clocher et provoque un début d’incendie. Lors de la restauration de l’édifice, on remarque en 1864 que le hors-plomb du clocher s’accentue dangereusement. La question revint sur toutes les lèvres : doit-on démolir le clocher ? Le problème, assez délicat à résoudre, demeure sans solution pendant de nombreuses années.

Après le passage d’un cyclone, le 12 mars 1876, on procède à l’inspection du clocher qui accuse une inclinaison très visible. Son hors-plomb calculé de la base de la charpente jusqu’au sommet de la croix est de 90 centimètres.

Le 23 août 1914, le jour du sac de la ville par les troupes allemandes, le clocher prend feu et flambe comme une torche annonçant la destruction de Dinant à plusieurs lieues à la ronde.
Symbolisant par excellence l’esprit cocardier des vieux Dinantais et malgré d’ardentes polémiques, le clocher fut reconstruit en 1926-1927.

 

Polémique concernant le maintien du bulbe lors de la restauration de la Collégiale dans les années 20

Au lendemain de la destruction de la ville de Dinant par les allemands en 1914, ce qui, pour d’aucuns, pourrait s’apparenter à une copèrerie, déchire les Dinantais. Une virulente polémique fait rage : faut-il, lors de la restauration de l’édifice, faire prévaloir un clocher gothique plus conforme au style général ou au contraire rétablir le clocher bulbeux ?

Deux clans se forment en 1921. D’une part, les anti-bulbeux qui comptent dans leurs rangs, les puristes et 2% de la population dinantaise. D’autre part, les conservateurs, le Conseil de Fabrique et les 98% restant de la population. Après bien des hésitations et des rebondissements, le Conseil de Fabrique abdique en acceptant à contrecoeur la reconstruction gothique du clocher. C’est alors que le Conseil communal engage une brusque marche arrière le 30 octobre 1923 et donne raison à ses électeurs en votant en faveur du bulbe. La gazette « La Dernière Heure » rapporte l’événement avec véhémence et intitule l’article "La logique battue par l'esprit de clocher". Les débats houleux qui ont animés la ville et ses habitants à cette époque ont inspiré le célèbre quincaillier de la rue Grande, Adolphe Raulin (1883-1953) qui produisit, sous le pseudonyme de Zigomar, de nombreuses chansons mais aussi des poésies satiriques.

 

Cortège des pro bulbeux à Dinant, 1921.

 

Pour en savoir plus sur le sujet lire : La Collégiale Notre-Dame de Dinant. Un pan de son histoire vu à travers des archives inédites (1565 - fin XVIIIe s.), Publication d’Espère en Mieulx, 2006. 

 Voir également la page : Carillon