Ville de Dinant
FRANCHET D'ESPEREY FRANCOIS  

  

 

 François Franchet d'Espérey, Mostaganem 1856 - Château de Saint-Amancet, Tarn 1942

 

Le 26 mai 1856, le capitaine de Chasseurs d' Afrique Louis Franchet d'Espérey se présente devant M. Jules Bollard, premier adjoint au Maire de Mostaganem, ville de garnison, pour déclarer la naissance de son fils Louis, Félix, Marie, François Franchet d'Espérey, à la date du 25 mai 1856, à huit heures et demie du soir, en sa demeure rue Porte - Neuve. En cette modeste ville de Mostaganem, un grand soldat vient de naître. Algérien, Franchet d'Espérey le restera toute sa vie. Préparé par les Pères Jésuites, il entre à SaintCyr en 1874, soit à l'âge de 18 ans, un an après Hubert Lyautey (promotion dénommée "Grande Promotion"). Sorti, en 1876, major de l'école de tir de Blida, il est déjà noté "valeur hors ligne". Après une campagne avec Lyautey contre les Khroumirs venus de Tunisie, il entre à l'Ecole de Guerre. Capitaine à 29 ans, l'année 1885 le voit arriver au Tonkin où il gagne sa Légion d'Honneur. En 1892, il épouse Mlle Dumaine de la Josserie, qui saura être, avec le tact d'une grande dame, la compagne d'un grand homme. Pendant toute son existence militaire, il ne peut tenir en place. Partout où la France se bat, il réclame sa part. Ainsi compte-t-il des campagnes en Algérie, en Tunisie, au Tonkin, en Chine et au Maroc.

Il est nommé général de division à 55 ans. Il est alors appelé par Lyautey au Maroc qu'il libéra d'une guérilla meurtrière. Sa récompense fut le commandement du 1er Corps d'armée.

En 1914, il faut repousser l'invasion allemande. Franchet d'Esperey fait partie de la Vème armée commandée par Lanrezac, se porte sur la Meuse avec la mission d'empêcher l'ennemi de traverser la Meuse entre Givet et Namur. C'est lui, qui de sa propre initiative fait occuper la citadelle de Dinant qu'il prendra le 15 août sous le feu nourri des Allemands. Il participe à la bataille de Charleroi où l'extrême promptitude de ses décisions sauve la Vème armée d'une prise à revers qui eût des effets désastreux sur la suite de l'histoire.

Il prend une large part à la victoire stratégique de Guise qui empêcha von Glück de marcher sur Paris et prépara la victoire décisive sur la Marne. Son action lors de la retraite lui vaut le commandement de la Ve Armée pendant la bataille de la Marne, celle qui reçoit le choc le plus violent avec l'armée Foch.

Il est commandant du groupe des armées de l'Est en 1916, puis du groupe des armées du Nord en 1917.

En juin 1917, il est nommé généralissime des armées alliées d'Orient. En septembre 1918, sa victoire en Macédoine amène la capitulation de Ferdinand de Bulgarie (armistice de Salonique). Le 29 septembre, Hindenburg, le chef d'état-major allemand, informe le chancelier du Reich qu'il faut demander la paix aux Alliés suite à l'écroulement du front de Macédoine.

La dignité du Maréchal lui est conférée le 19 février 1921, en même temps qu'à Lyautey. Il convient de souligner la profonde affection qu'il manifesta toujours à l'Armée d'Afrique qui fut son berceau. Inspecteur des Troupes d'Afrique, il ne s'embarrassa pas, à l'image de Lyautey, de filières administratives, de formules et d'action à l'efficacité douteuse, en saisissant à bras le corps la réalité et en mettant tout le poids de son autorité dans les demandes pour l'Afrique du Nord qu'il estimait nécessaires d'adresser en haut lieu. Voulant continuer à servir ce qui avait été l'idéal de sa vie, il créa le Comité des Amitiés Africaines où, au nom de l'estime et de la confiance nées sur le champ de bataille, tous, chefs et soldats de l'Armée d'Afrique devaient se retrouver, s'entre aider dans leurs difficultés morales et matérielles et, unis dans une amitié solide, conserver le culte de la France. Attirés par les services qui leur étaient rendus, séduits plus encore par l'amitié qui leur était témoignée, les anciens militaires, indigènes principalement, vinrent de plus en plus nombreux.

Il décida donc de créer des salles de réunion où pouvaient se retrouver tous les anciens soldats. Ainsi débutèrent les Maisons du Combattant, en arabe "Dar el Askri", qui furent reconnues d'utilité publique le 24 mai 1938, En 1947, 128 Maisons du Combattant comptaient 146 000 adhérents, ce qui ne représentait encore qu'une assez faible proportion des anciens militaires musulmans.

De 1922 à 1924, se déroulèrent les grandes expéditions transsahariennes, objets de belles et rudes compétitions entre les firmes Citroën (Haardt et AudouinDubreuil) et Renault (Gradis). En 1924, le Maréchal fut invité, à titre privé, par cette dernière et traversa le Sahara. Passa-t-il sa "baraka" à la maison Renault ? Dès cette période la voiture Renault, aux roues hautes et larges, montra sa supériorité sur les éléments à chenille de Citroën. Cette victoire, il devait l'expier cruellement par un accident stupide qui le laissa infirme le restant de sa vie. En mars 1933, voulant étudier une liaison Tunisie - Maroc (Gabès - Agadir) par le sud, à 40 km du départ, sa voiture fit plusieurs tonneaux. On releva le Maréchal avec une fracture du bassin et des jambes. Une fatalité mécanique brisait ce corps d'acier que les fatigues des campagnes de guerre n'avaient pu entamer. Ces souffrances physiques vinrent s'ajouter au chagrin lancinant de la perte de son fils, jeune officier tombé à Douaumont !

Il inaugure le cimetière français de Dinant le 5 juin 1923.

L'activité intellectuelle du Maréchal, toujours en éveil, fut récompensée par son admission en 1935 à l'Académie Française. Il fut aussi, dès sa création en 1922, membre de l'Académie des Sciences Coloniales, dont il exerça la présidence en 1925 - 26.

Après avoir présidé à Alger les fêtes grandioses du Centenaire, le Maréchal donna son nom au musée historique de l'Algérie, installé sur les lieux mêmes où le Lieutenant Général de Bourmont planta le drapeau français. La pensée de ce grand chef flotta au fronton du musée comme une oriflamme : honorer et garder le souvenir de tous ceux qui ont fait la grandeur de ce pays, les soldats, les colons, les musulmans qui, à nos côtés, ont servi une grande cause humaine...

Les nombreuses collections exposées dans l'ancien palais du Dey ne furent pas réunies pour la seule documentation des spécialistes, mais aussi pour toucher le grand public. Cela explique certains côtés de la présentation, spectaculaire pour l'époque, notamment les reconstitutions de scènes historiques sous forme de dioramas.

Malgré l'affection dont tous les siens l'entourèrent, ce Maréchal de France n'eut pas une vieillesse heureuse, et surtout la fin paisible qu'il pouvait espérer. Il mourut le 8 juillet 1942, au lendemain d'une sévère défaite de la France et sous l'occupation d'une puissance étrangère au château d'Amanouet, dans le Tarn !

J.G.

Bibliographie établie d'après des textes parus dans le numéro spécial Cahiers Charles de Foucauld, n° 41 1956, consacré au Maréchal Franchet d'Espérey.